Qu’est-ce que la gauche ?
Suivant une tendance déjà bien amorcée depuis 2017, l’élection présidentielle de 2022 a nettement fait apparaitre un fractionnement de l’électorat français entre trois idéologies prépondérantes. Si le libéralisme et le nationalisme sont relativement simples à définir, la troisième, moins. Parce que la notion est communément admise, je parlerai ici de l’idéologie « de gauche », et je vais chercher à identifier ce qui la définit. Commençons déjà par bien définir ce qu’elle n’est pas, à savoir les deux autres. Le libéralisme est la conviction que les initiatives privées (à but lucratif) sont plus efficaces que celles publiques (sans objectifs de rentabilité) pour assurer le bien-être de la majorité des individus, et qu’il faut donc leur fournir un contexte de développement le plus libre possible. Le nationalisme est la conviction que pour assurer le bien-être des individus, il faut les regrouper en nations et appliquer un traitement préférentiel aux citoyennės de sa nation.
L’idéologie de gauche, quant à
elle, semble plurielle. Cela n’a jamais été plus criant qu’avec la Nouvelle
Union Populaire, Ecologique et Sociale. Commençons par ces trois adjectifs :
Populaire, donc représentative de la majorité de la population (ce que
les résultats électoraux ne semblent pas confirmer) ou particulièrement des
« classes populaires », les plus précaires (ce que revendique
également le Rassemblement National) ; Ecologique, donc soucieuse
d’équilibrer le rapport entre l’humanité et le reste du Vivant ; Sociale,
donc garante des droits sociaux, des principes d’égalité et de solidarité. A
cela s’ajoutent d’autres convictions portées par chaque parti politique intégré
à l’Union : le progressisme sociétal, le communisme ou collectivisme,
la démocratie, le respect et la valorisation des diversités (de genre,
orientation sexuelle, culture, etc). L’idéologie de gauche ressemble à un véritable
fourre-tout, et pourtant la pensée de ses électeurices est parfaitement cohérente.
Quel est donc ce liant, ce lien, qui malgré certaines divergences d’opinions, permet
de tracer sans trop de difficultés les contours de la gauche ?
On peut déjà évacuer ce qui
malgré la mauvaise foi de certains commentateurs extérieurs, ne la caractérise
pas : la gauche n’est pas intrinsèquement pour ou contre l’Union
Européenne, pour ou contre l’énergie nucléaire. Chaque courant politique a sa
propre histoire, et chaque parti, particulièrement à l’approche d’élections,
doit faire des choix pour écrire un programme. Cela ne signifie pas que chaque
mesure qu’il propose le caractérise irrémédiablement.
Si on se risque à quelques raccourcis
empreints de stéréotypes, on pourrait dire que les adeptes du libéralisme
sont des personnes à qui le système actuel profite, tandis que les adeptes du
nationalisme en souffrent ou craignent ses conséquences sur leur avenir (qu’il
s’agisse de leur accès à un travail décent, leur identité, voire leur existence
même qui serait menacée par un remplacement par des populations étrangères). A
gauche, on trouve à la fois des personnes à qui le système actuel profite, et
d’autres qui en souffrent ou craignent ses conséquences sur leur avenir. Alors
pourquoi une personne aisée souhaiterait-elle changer le système, pourquoi une
personne pauvre verrait-elle la menace dans les classes dominantes plutôt que
dans les étrangers ? La question posée ainsi, sa réponse me semble évidente.
Parce qu’à gauche, on se met à la place des autres. L’idéologie de gauche,
c’est l’altruisme.
C’est l’altruisme qui nous fait
penser aux pauvres quand on est aisé, aux animaux qu’on extermine, aux migrants
qu’on laisse mourir, aux futurs humains qu’on ne connaitra jamais et aux
humains d’autres continents qu’on ne rencontrera jamais, aux femmes quand on
est un homme, aux personnes racisées quand on ne l’est pas, lgbt quand on ne l’est
pas.
Alors bien sûr, tout le monde
ne vote pas pareil pour les mêmes raisons. Certainės électeurices de gauche ne se
retrouvent pas du tout dans les convictions que je viens d’énumérer, de même que
certaines personnes votent pour le libéralisme ou le nationalisme pour des priorités
qui n’ont rien à voir avec ces deux idéologies. Pour autant, je pense qu’elles
sont un prérequis : je n’imagine pas quelqu’un voter pour Macron en
étant convaincu que le pouvoir public doit dominer le pouvoir privé, ou pour Le
Pen en étant convaincu que les étrangers ont les mêmes droits que les français.
De la même manière, je n’imagine pas quelqu’un voter à gauche en étant
convaincu que la vie des autres n’a pas d’importance.
Il ne me reste plus qu’à m’adresser
à toutės
mes amiės
de gauche : ne laissez pas les conservateurs et réactionnaires de tous
bords vous faire croire que nos désaccords sont irréconciliables et notre union
artificielle. La France et le monde ont besoins de tous les altruistes pour
faire face aux défis que nous connaissons, nos convergences sont plus belles
et plus fortes que toutes nos divergences. Un-hissons nos couleurs pour un
avenir arc-en-ciel !