mercredi 4 janvier 2017

The Revenant

2016 - Alejandro Gonzalez Inarritu 



Une expérience inoubliable ! Et au centre : la survie. Celle du personnage de DiCaprio, redevenu animal, brisé physiquement et moralement. De celui de Tom Hardy, pragmatique, sombre et réaliste. Des indigènes, massacrés. Des soldats américains en territoire mortel. Et même des animaux sauvages. Et cette survie, elle est extrêmement violente. Certaines scènes, dont l’attaque de l’ours, ont peu d’égales au cinéma. La réalisation est phénoménale : contraste entre une lenteur générale et le rythme effréné de certains passages, plans-séquences bluffants, switch entre les différents parcours toujours pertinent. La nature est sublimée, l’humanité disséquée, le film engagé. Le cadre spatio-temporel est effacé au profit de l’universalité du genre humain. Et si l’absence de véritable scénario en a dérangé certains, c’est qu’ils recherchaient une évolution là où s’impose une progression. Enfin, bien sûr, le jeu d’acteur : si DiCaprio est exceptionnel, dans sa retranscription de la douleur, physique et morale, il est loin d’être le seul, et l’ensemble forme un tout grandiose.

Scénario : Mark L. Smith (d'après l'oeuvre de Michael Punke)
Musique : Ryuichi Sakamoto et Carsten Nicolai
Photographie : Emmanuel Lubezki

Ex Machina

2015 - Alex Garland



Sublime. Lent et percutant, beau et terrible, simple et tordu. Quatre personnages en huis clos permettent de perfectionner la réalisation jusque dans les moindres détails. Le sujet est d’actualité, la vision révolutionnaire. Et à vrai dire, elle nous effraie quelque peu. Le casting est incroyable, le décor d’une modernité grandiose. Sans se prendre la tête, on s’interroge, on hésite, on s’émerveille... Soyons honnête, le film n’est pas gai, les personnages pas vraiment attachants, mais le but est ailleurs, et atteint : aborder avec une extrême justesse la problématique de l’intelligence artificielle consciente. Le maître mot : simplicité. Dans les plans, les dialogues, les musiques. Et si au passage ils parviennent à glisser quelques réflexions sur les relations humaines ou le big data, ce n’en est que plus piquant. Un film qui, si vous parvenez à adhérer au rythme ralenti, ne vous épargnera pas. 

Synopsis

Caleb est un brillant codeur chez BlueBook, le plus important moteur de recherche mondial, qui gagne un séjour d’une semaine auprès du fondateur de cet empire technologique. Mais en arrivant dans la demeure isolée, il découvre la véritable raison de sa présence : il va interagir avec Ava, une intelligence artificielle à corps de femme.

Scénario : Alex Garland
Musique : Geoff Barrow et Benjamin Salisbury (montage par Yann McCullough)
Photographie : Rob Hardy

lundi 2 janvier 2017

Le Pont des Espions

2015 - Steven Spielberg



Magistral ! La guerre froide, cette époque, aux États-Unis, c’est vu et revu. Mais jamais comme ça ! Le questionnement sur les implications légales et morales de l’espionnage est profondément humain. C’est tout d’abord la rencontre de deux hommes de valeurs dans un contexte de procès, mais cela s’oriente ensuite sur le poids de l’opinion politique dans la justice, pour enfin plonger dans la noirceur des intrigues diplomatiques, et les conséquences de suivre sa conscience contre vents et marées. Comme toujours Tom Hanks incarne une figure forte et réfléchie, qui n’hésite pas à se lever contre l’injustice, au travers de discours puissamment humanistes. L’autre force du film, c’est cette vision inédite de Berlin au moment de l’érection du mur. Une vision marquante.

Et pour l’anecdote je ne me rappelais plus quel Oscar avait reçu ce film, et bien il saute littéralement aux yeux : le jeu de Mark Rylance est juste incroyable.

Synopsis

James Donovan, avocat à Brooklyn, est plongé malgré lui au cœur de la guerre froide lorsqu'il doit défendre un espion soviétique, puis que la CIA l’envoie à Berlin Est négocier la libération du pilote d’un avion espion américain U-2.

Scénario : Matt Charman, Joel et Ethan Coen
Musique : Thomas Newman
Photographie : Janusz Kaminski

MacBeth

2015 - Justin Kurzel



Accrochez-vous. Comme toute oeuvre d’art, MacBeth se laisse admirer, lentement... Si vous y êtes prêt, ouvrez grand les yeux, ils seront comblés. Arrêts sur images fractionnés au coeur d’une extrême violence ; jeu de couleurs sombre et hypnotisant ; ambition et folie exacerbés par des acteurs qui poussent la tragédie à son apogée. Destin inéluctable et âmes torturées. Pour les amateurs de la pièce néanmoins, on s’en éloigne, bien que les dialogues aient des airs de tirades. Kurzel s’est ici approprié l’oeuvre Shakespearienne pour l’adapter à son époque. Peut-être un peu trop, et c’est là le seul reproche que je peux faire : une scène choquante, qui m’a rappelé un traumatisme cinématographique personnel. En conclusion : à voir, avec l’esprit ouvert, et pas une trop grande sensibilité.

Synopsis

11ème siècle, Ecosse. Macbeth, chef des armées, sort victorieux de la guerre qui fait rage dans tout le pays. Sur son chemin, trois sorcières lui prédisent qu’il deviendra roi. Comme envoûtés par la prophétie, Macbeth et son épouse montent alors un plan machiavélique pour régner sur le trône, jusqu’à en perdre la raison.

Scénario : Todd Louiso (d'après l'oeuvre de William Shakespeare)
Musique : Jed Kurzel
Photographie : Adam Arkapaw

Midnight Special

2016 - Jeff Nichols



Midnight Special est frustrant. Parce que si il invite à l’interrogation, il se garde bien de risquer des réponses. C’est une oeuvre d’art qui ne véhicule d’autre message que celui que chacun y verra. Quand on sort, on veut en parler, mais on ne sait pas quoi dire. Ambiance années 70, un rythme globalement lent ponctué de quelques éclats, du drame et presque rien d’autre. Très peu d’émotions. Et ce qu’il a surtout de particulier, c’est la volonté de ne pas accrocher de caractères clairs sur les personnages. A peine quelques indices, quelques phrases échangées qui laissent deviner les rapports entre protagonistes... Les acteurs jouent au minimum, il y a la volonté d’influencer le moins possible le spectateur. Le travers de cela, c’est qu’on ne s’attache à personne, ou presque. On ne sait pas où va le film (ou alors on ne sait pas encore qu’il ne va nulle part). Certaines scènes n’ont pas de sens, ce qui fait gagner en réalisme, mais pas en immersion. Il n’a jamais été question de nous impliquer, on ne fait qu’observer. Et si le mystère est présent, il est dopé artificiellement, il nous embrouille dans le seul but de le faire. Une oeuvre, mais ni particulièrement belle, ni particulièrement puissante. Et pourtant, on a ce petit goût qui reste, pas désagréable, et qui donnerait presque envie d’y revenir.

Synopsis

Fuyant d'abord des fanatiques religieux et des forces de police, Roy, père de famille et son fils Alton, se retrouvent bientôt les proies d'une chasse à l'homme à travers tout le pays, mobilisant même les plus hautes instances du gouvernement fédéral. En fin de compte, le père risque tout pour sauver son fils et lui permettre d'accomplir son destin. Un destin qui pourrait bien changer le monde pour toujours.

Scénario : Jeff Nichols
Musique : David Wingo
Photographie : Adam Stone

Take Shelter

2012 - Jeff Nichols



Le plus impressionnant, c’est la crédibilité de ce film. De bout en bout, on s’interroge : est-ce qu’il s’agit d’hallucinations d’un père à l’héritage psychologique difficile, ou un véritable pouvoir psychique ? Et dans les deux cas, on y croit ! La réalisation est sans défaut, mais le film doit essentiellement cette force du réel à un jeu d’acteur époustouflant. Les personnages de Michael Shannon et Jessica Chastain sont quasiment seuls (avec leur fille) face à la tempête mentale. Le résultat, intime, est suffisamment rapide pour ne jamais décrocher, suffisamment lent pour laisser le temps de s’interroger... Violemment. Voir à travers les yeux d’un esprit perturbé, qui doute autant que nous, c’est un défi, une épreuve, et ce soir une grande victoire. Les films d’une telle qualité sont rares, ne faites pas l’erreur de passer à côté.

Synopsis

Curtis LaForche mène une vie paisible avec sa femme et sa fille quand il devient sujet à de violents cauchemars. La menace d'une tornade l'obsède. Des visions apocalyptiques envahissent peu à peu son esprit. Son comportement inexplicable fragilise son couple et provoque l'incompréhension de ses proches. Rien ne peut en effet vaincre la terreur qui l'habite...

Scénario : Jeff Nichols
Musique : David Wingo
Photograhie : Adam Stone
Mommy

2014 - Xavier Dolan



Ouch. Jamais vu un film aussi dur. Et d’une grande violence, plus souvent verbale que physique. On a envie, par facilité, de dire que c’est impossible de vivre avec un enfant comme ça. Mais c’est aussi un film d’une extrême beauté, parce que bien sûr la vie n’est pas monochrome. Un garçon aussi vulgaire que dangereux peut aussi être le plus adorable des enfants. On a envie de voir de l’espoir, de sortir des ténèbres, et en cela la réalisation est parfaitement adaptée, et plus particulièrement le format d’image et les plans de caméras incongrus. En somme le film ne comporte que trois personnages, trois acteurs exceptionnels. Non, phénoménaux. Ils ne pourront pas vous laisser indemne. C’est un visionnage véritablement intense. On peut descendre au plus bas, puis remonter en flèche. Mais attention, même les plus optimistes auront du mal à sortir du canapé après que le générique soit tombé. Les musiques et les messages sont beaux et sont terribles. Tragiques. Terrifiants. On ne regarde pas Mommy pour le plaisir. On le regarde pour comprendre.

Synopsis

Diane, veuve, doit s'occuper de son fils handicapé (Trouble Déficit de l'Attention) Steve, un adolescent impulsif et violent. Malgré les difficultés, chacun tente de sauver l'autre, avec l'aide inattendue d'une énigmatique voisine, Kyla. Ensemble ils vont parvenir à une forme d'équilibre, et commencer à reprendre espoir.

Scénario : Xavier Dolan
Musique : Noia
Photographie : André Turpin

Juste la fin du monde 

2016 - Xavier Dolan



Une performance incroyable. Un lieu, cinq personnages, et une justesse exceptionnelle. Plus que réaliste, vivant. Mais pas la partie heureuse de la vie, bien au contraire. La colère, la honte, la peur, toutes ces émotions à peine contrôlées, flottant d’une personne à l’autre, autour d’un protagoniste impuissant, un fantôme qui ne revient que pour repartir encore plus durement. Comment parler, comment oser ? Les dialogues sont vibrants, parce qu’hésitants. Les conflits, les espoirs, les rancunes, tout est dit à mi-mots ou pas dit du tout, et pourtant il n’y a qu’une fin possible, inévitable, et intolérable. Soit vous décrocherez dés le début, soit vous n’en perdrez pas une miette. 

Synopsis

Après douze ans d'absence, un jeune écrivain de pièces célèbres revient voir sa famille, pour leur annoncer sa mort prochaine. Cinq personnages en huis-clos mettent en scène un drame familial sans issue, où amour, colère et tristesse s'expriment au même titre. 

Scénario : Xavier Dolan (d'après l'oeuvre de Jean-Luc Lagarce)
Musique : Gabriel Yared
Photographie : André Turpin

dimanche 1 janvier 2017

Enemy

2014 - Denis Villeneuve





What the ... ?! Je commence à être un peu familier des oeuvres de Villeneuve, mais celle-ci me laisse perplexe ! Deux hommes aux vies différentes mais avec un physique et une voix strictement identiques. C’est dérangeant, mais ça ne suffit pas à en faire de la science-fiction. Ce qui n’est pas l’objectif. Et pourtant, j’ai peut-être du mal à m’imaginer dans la même situation, mais les réactions me paraissent un peu... surnaturelles. Une voix au téléphone, honnêtement, c’est trompeur. S’ajoute à cela une thématique du rêve morbide qui fera fuir les arachnophobes, et que je ne parviens pas à expliquer, volonté artistique mise à part. Bon, mais le cœur du film est... inexistant ? Le rythme, d’une extrême lenteur. La photographie, grisâtre. Les musiques, dédiée à l’ambiance, comme toujours. Mais quelle ambiance ? Conclusion, c’est peut-être un chef-d'œuvre, mais il m’a totalement échappé !

Du moins jusqu'à voir une interprétation possible par le Fossoyeur de Films... Et du tout au tout Enemy me torture l'esprit avec ses airs de mindfuck. Ce qui est une bonne chose ! Je ne dis pas que c'est l'explication, je ne suis pas d'accord avec tout, mais jetez-y un coup d'oeil et faites-vous votre propre avis :
L'APRÈS-SÉANCE - Enemy (l'explication ?)

Scénario : Javier Gullon (d'après l'oeuvre de José Saramago)
Musique : Danny Bensi
Photographie : Nicolas Bolduc

Assassin's Creed

2016 - Justin Kurzel



Il est impressionnant ! Avec des décors superbes, et de très belles cascades. Et totalement fidèle à l’univers des jeux. Et bien joué. Mais alors pourquoi je ne suis pas plus emballé que ça ? Pas déçu, il est vraiment excellent, mais juste pas dedans. Peut-être parce que si réussir à résumer proprement tout l’univers en deux heures est un exploit, c’est un peu frustrant pour qui le connait déjà par coeur. Cela mis à part, c’est un bijou. Il est innovant (cet Animus !) sans excès, grandiose et un petit peu extravagant. 

Synopsis

Grâce à l'Animus, technologie permettant d'accéder à sa mémoire génétique, Callum Lynch revit les aventures de son ancêtre Aguilar, durant l'Inquisition espagnole du XVe siècle. Callum découvre qu’il est issu d’une mystérieuse société secrète, les Assassins, en guerre contre ceux qui le retiennent et l'utilisent : l'Ordre des Templiers. 

Scénario : Michael Lesslie
Musique : Jed Kurzel
Photographie : Adam Arkapaw

High-Rise

2016 - Ben Wheatley



Ce film ! Incompréhensible ! Et trash en plus ! J’adore. On ne sait pas vraiment quand ni pourquoi tous ces gens de différentes classes sociales se retrouvent dans cette tour, mais ce que je peux vous dire, c’est qu’il y a un cheval sur le toit. Le personnage principal, psychanalyste (donc il découpe des crânes à la scie), est le témoin détaché de cette folie humaine, le seul qui survit au naufrage de ce Titanic vertical. On y discerne une lutte sociale, une arrogance des grands créateurs, une critique de la société consumériste, et un dalmatien dans le caddie. Si l’absurde ne vous fait pas sourire dés les premières minutes, passez votre chemin. Si oui, amusez-vous bien !

Scénario : Amy Jump (d'après l'oeuvre de J. G. Ballard)
Musique : Clint Mansell
Photographie : Laurie Rose