lundi 13 juillet 2020

Adults in the room

2019 - Costa-Gavras



Costa-Gravas est surtout connu pour ses films historiques et politiques, Adults in the room n’y fait pas exception. Alors que la Grèce subit depuis sept ans la politique d’austérité et la vente de ses infrastructures imposées par les pouvoirs économiques européens, le parti Syriza accède au pouvoir en s’engageant à se libérer de cette emprise. Le film est centré sur Yánis Varoufákis, ministre des finances après ces élections de 2015, et la tâche herculéenne qu’il entreprend pour renégocier les exigences de l’Eurogroupe. Présenté comme déterminé autant que raisonnable et prêt à des concessions (il est bon de souligner que le scénario est basé sur son roman, donc coloré par sa subjectivité), il se heurte à un mur obtus. Les faits mis en scène, plus que dramatiques, relèvent de la tragédie, tellement l’impuissance et la fatalité sont omniprésentes. L’Eurogroupe, conscient de sa position dominante (dans la mesure où la résolution extrême d’une sortie de l’UE n’est pas pour lui déplaire), en abuse avec une vulgarité révoltante. 

Loin d’être un traitement technique comme peut l’être The Big Short, la narration se focalise ici sur des considérations relevant du bon sens, balayées par une logique financière impitoyable qui parvient à choquer un personnage pourtant cynique. Si les causes de la crise des subprimes présentées par Adam McKay relèvent de la stupidité d’une logique de profit individuel à court-terme, la gestion de ses conséquences présentée par Costa-Gravas est rageante par sa lucidité : les décisions prisent ne peuvent qu’empirer la situation de la Grèce, mais c’est au profit de ces autres pays, qui n’ont alors aucune raison de seulement écouter le protagoniste.

La réalisation est sobre, et on pourrait la trouver répétitive si cela ne visait pas justement à insister sur le jeu de dupes qui est mené. Chaque espoir d’amélioration, qu’on finit par imaginer être distribués avec sadisme, est rapidement douché par la position inchangée de l’Eurogroupe. On s’attache au personnage par empathie, sens de la justice, et finalement pitié. L’ancrage dans le réel est d’autant plus marquant qu’on reconnait plusieurs figures politiques européennes jouées par des actrices/acteurs ressemblants. Enfin, la conclusion métaphorique invite à se renseigner sur l’actualité, pour comprendre qu’encore cinq ans plus tard, rien n’a changé.


Scénario : Costa-Gavras & Stéphane Osmont (d'après l'oeuvre de Yánis Varoufákis)
Musique : Alexandre Desplat
Photographie : Yorgos Arvanitis

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